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| | | | Invité / Invité Ven 26 Fév 2010 - 22:17 | |
| A la toussaint, Les Malpolis Si tu ne m’as pas vu faire la tournée des sépultures, Au jour de la Toussaint, c’est que j’étais grippé, je t’assure, Et au mois de novembre, courir entre les courants d’air, De cim'tière en cim'tière, c’est comme ça qu’on n’passe pas l’hiver ! C’est pas qu’les fleurs soient chères, ni le cimetière trop loin Si je n’te rends pas visite aussi souvent qu’il se doit, C’est que j'me dis qu’tu n’as, sommes toutes, besoin de rien, Qu’tu dois t’plaire dans ton trou puisque j'vois que tu n’en sors pas ! Et puis pour toi qui aimais les fleurs, quel gâchis, imbécile, Quelle tristesse serait de les voir faner dans leurs pots ; Alors qu’tu t’décarcasses, à faire de l’engrais fertile Et qu’je n’peux même pas jardiner l’humus de ton caveau. Mais ma chère disparue, depuis que tes os sont sous terre, C’n’est pas dans ton cim’tière que je te retrouve, crois moi, Quand je pense à ces fêtes, que tu m’as offertes de ta chair, C’n’est pas ce p’tit trou austère qui m’fait l’mieux m’souvenir de toi! Je te laisse et j’espère, comme dit la forme consacrée Que « tu reposes en paix »… Mêm’ si je n’m’en fais pas trop. T’étais pas bien épaisse, t’as pas du être trop emmerdée Bien longtemps par les vers, ni non plus par les escargots. Mais j’présume qu’ils ont quand même conclu au festin, Non, t’étais pas bien grosse, mais quelle pièce de choix ! Z’ont pas du chipoter à t’croquer les fesses et les seins Sans compter qu’après tout, c’est toi qui offrais le repas. |
| | Nombre de messages : 3643 Âge : 32 Date d'inscription : 22/06/2009 | Insane. / Avant, j'avais un rang. Mais c'était avant. Sam 27 Fév 2010 - 16:58 | |
| Alfred de Musset
La nuit
Quand la lune blanche S'accroche à la branche Pour voir Si quelque feu rouge Dans l'horizon bouge Le soir,
Fol alors qui livre A la nuit son livre Savant, Son pied aux collines, Et ses mandolines Au vent ;
Fol qui dit un conte, Car minuit qui compte Le temps, Passe avec le prince Des sabbats qui grince Des dents.
L'amant qui compare Quelque beauté rare Au jour, Tire une ballade De son coeur malade D'amour.
Mais voici dans l'ombre Qu'une ronde sombre Se fait, L'enfer autour danse, Tous dans un silence Parfait.
Tout pendu de Grève, Tout Juif mort soulève Son front, Tous noyés des havres Pressent leurs cadavres En rond.
Et les âmes feues Joignent leurs mains bleues Sans os ; Lui tranquille chante D'une voix touchante Ses maux.
Mais lorsque sa harpe, Où flotte une écharpe, Se tait, Il veut fuir... La danse L'entoure en silence Parfait.
Le cercle l'embrasse, Son pied s'entrelace Aux morts, Sa tête se brise Sur la terre grise ! Alors
La ronde contente, En ris éclatante, Le prend ; Tout mort sans rancune Trouve au clair de lune Son rang.
Car la lune blanche S'accroche à la branche Pour voir Si quelque feu rouge Dans l'horizon bouge Le soir. |
| | Nombre de messages : 4283 Âge : 35 Localisation : en exil Pensée du jour : "La dépression nerveuse. Histoire de papillons." Yves Saint Laurent Date d'inscription : 14/01/2008 | Ludwig Saint Laurent / Photographe de particules Dim 28 Fév 2010 - 3:12 | |
| C'est absolument sublime...Parfait. Juste parfait. Je ne le connaissais pas. |
| | Nombre de messages : 3643 Âge : 32 Date d'inscription : 22/06/2009 | Insane. / Avant, j'avais un rang. Mais c'était avant. Ven 5 Mar 2010 - 3:05 | |
| Rimbaud : Ô saisons, ô châteaux Ô saisons, ô châteaux, Quelle âme est sans défauts ? Ô saisons, ô châteaux, J'ai fait la magique étude Du Bonheur, que nul n'élude. Ô vive lui, chaque fois Que chante son coq gaulois. Mais ! je n'aurai plus d'envie, Il s'est chargé de ma vie. Ce Charme ! il prit âme et corps, Et dispersa tous efforts. Que comprendre à ma parole ? Il fait qu'elle fuie et vole ! Ô saisons, ô châteaux ! [ Et, si le malheur m'entraîne, Sa disgrâce m'est certaine. Il faut que son dédain, las ! Me livre au plus prompt trépas ! - Ô Saisons, ô Châteaux ! Quelle âme est sans défauts ?] |
| | Nombre de messages : 4283 Âge : 35 Localisation : en exil Pensée du jour : "La dépression nerveuse. Histoire de papillons." Yves Saint Laurent Date d'inscription : 14/01/2008 | Ludwig Saint Laurent / Photographe de particules Ven 12 Mar 2010 - 0:21 | |
| Le départ Et leurs visages étaient pâles Et leurs sanglots s'étaient brisés Comme la neige aux purs pétales Ou bien tes mains sur mes baisers Tombaient les feuilles automnales (Apollinaire) |
| | Nombre de messages : 3363 Âge : 32 Date d'inscription : 31/10/2008 | Hobbes / Attention : chat méchant Mer 2 Juin 2010 - 16:31 | |
| - Michaux a écrit:
- Un jour,
Un jour, bientôt peut-être, Un jour j'arracherai l'ancre qui tient mon navire loin des mers
Avec la sorte de courage qu'il faut pour être rien et rien que rien. Je lâcherai ce qui paraissait m'être indissolublement proche.
Je le trancherai, je le renverserai, je le romprai, je le ferai dégringoler. D'un coup dégorgeant ma misérable pudeur, mes misérables combinaisons et enchaînements "de fil en aiguille" Vide de l'abcès d'être quelqu'un, je boirai à nouveau l'espace nourricier.
A coups de ridicule, de déchéances (qu'est-ce que la déchéance?), par éclatement. Par vide, par une totale dissipation-dérision-purgation, j'expulserai de moi la forme qu'on croyait si bien attachée, composée, coordonnée, assortie à mon entourage Et à mes semblables, si dignes, si dignes mes semblables.
Réduit à une humilité de catastrophe, à un nivellement parfait comme après une immense trouille. Ramené au-dessous de toute mesure à mon rang réel, au rang infime que je ne sais quelle idée-ambition m'avait fait déserter. Anéanti quant à la hauteur, quant à l'estime. Perdu en un endroit lointain (ou même pas), sans nom, sans identité.
CLOWN, abattant dans la risée, dans l'esclaffement, dans le grotesque, le sens que toute lumière je m'étais fait de mon importance. Je plongerai. Sans bourse dans l'infini-esprit sous-jacent ouvert à tous, ouvert moi-même à une nouvelle et incroyable rosée.
A force d'être nul Et ras Et risible... (Clown.) |
| | Nombre de messages : 1960 Âge : 15 Localisation : Paris Pensée du jour : Le rêve des cavaliers de Verdun. Date d'inscription : 25/04/2007 | Joyeux / Et elle mangea des gaufres Mer 2 Juin 2010 - 16:39 | |
| OUI OUI OUI.
Je valide, Hobbes. J'illustre toutes mes dissert' avec. Il est trop stylé.
Enfin, les trois premières strophes mises hors contexte.
C'est fou ça. Des fois tu me surprends, petit. |
| | | Invité / Invité Mer 2 Juin 2010 - 16:40 | |
| La mort des amants
Nous aurons des lits pleins d’odeurs légères, Des divans profonds comme des tombeaux, Et d’étranges fleurs sur des étagères, Écloses pour nous sous des cieux plus beaux.
Usant à l’envi leurs chaleurs dernières, Nos deux cœurs seront deux vastes flambeaux, Qui réfléchiront leurs doubles lumières Dans nos deux esprits, ces miroirs jumeaux.
Un soir plein de rose et de bleu mystique, Nous échangerons un éclair unique, Comme un long sanglot, tout chargé d’adieux ;
Et bientôt un Ange entr’ouvrant les portes, Viendra ranimer, fidèle et joyeux, Les miroirs ternis et les flammes mortes.
Charles Baudelaire |
| | Nombre de messages : 3643 Âge : 32 Date d'inscription : 22/06/2009 | Insane. / Avant, j'avais un rang. Mais c'était avant. Mer 2 Juin 2010 - 17:30 | |
| Ah, on fait revivre ce topic, tout un cirque d'émotions !
Bon, celui-ci :
If de Kipling
IF you can keep your head when all about you Are losing theirs and blaming it on you, If you can trust yourself when all men doubt you, But make allowance for their doubting too; If you can wait and not be tired by waiting, Or being lied about, don't deal in lies, Or being hated, don't give way to hating, And yet don't look too good, nor talk too wise:
If you can dream - and not make dreams your master; If you can think - and not make thoughts your aim; If you can meet with Triumph and Disaster And treat those two impostors just the same; If you can bear to hear the truth you've spoken Twisted by knaves to make a trap for fools, Or watch the things you gave your life to, broken, And stoop and build 'em up with worn-out tools:
If you can make one heap of all your winnings And risk it on one turn of pitch-and-toss, And lose, and start again at your beginnings And never breathe a word about your loss; If you can force your heart and nerve and sinew To serve your turn long after they are gone, And so hold on when there is nothing in you Except the Will which says to them: 'Hold on!'
If you can talk with crowds and keep your virtue, ' Or walk with Kings - nor lose the common touch, if neither foes nor loving friends can hurt you, If all men count with you, but none too much; If you can fill the unforgiving minute With sixty seconds' worth of distance run, Yours is the Earth and everything that's in it, And - which is more - you'll be a Man, my son!
Faut le réciter avec la voix d'un patriarche, ça fait plus d'effet. |
| | | Invité / Invité Mer 2 Juin 2010 - 17:38 | |
| Bien joué Insane. Pour suivre Insane, voilà la traduction de ce poème. Traduction de Traduction de Germaine Bernard-Cherchevsky (1942)
Si...
Si tu restes ton maître alors qu'autour de toi Nul n'est resté le sien, et que chacun t'accuse ; Si tu peux te fier à toi quand tous en doutent, En faisant cependant sa part juste à leur doute ; Si tu sais patienter sans lasser ta patience, Si, sachant qu'on te ment, tu sais ne pas mentir ; Ou, sachant qu'on te hait, tu sais ne pas haïr, Sans avoir l'air trop bon ou paraître trop sage ;
Si tu aimes rêver sans t'asservir au rêve ; Si, aimant la pensée, tu n'en fais pas ton but, Si tu peux affronter, et triomphe, et désastre, Et traiter en égaux ces deux traîtres égaux ; Si tu peux endurer de voir la vérité Que tu as proclamée, masquée et déformée Par les plus bas valets en pièges pour les sots, Si voyant s'écrouler l'œuvre qui fut ta vie, Tu peux la rebâtir de tes outils usés ;
Si tu peux rassembler tout ce que tu conquis Mettre ce tout en jeu sur un seul coup de dés, Perdre et recommencer du point d'où tu partis Sans jamais dire un mot de ce qui fut perdu ; Si tu peux obliger ton cœur, tes nerfs, ta moelle À te servir encore quand ils ont cessé d'être, Si tu restes debout quand tout s'écroule en toi Sauf une volonté qui sait survivre à tout ;
Si t'adressant aux foules tu gardes ta vertu ; Si, fréquentant les Rois, tu sais rester toi-même, Si ton plus cher ami, si ton pire ennemi Sont tous deux impuissants à te blesser au cœur, Si tout homme avec toi compte sans trop compter ; Si tu sais mettre en la minute inexorable Exactement pesées les soixante secondes Alors la Terre est tienne et tout ce qu'elle porte Et mieux encore tu seras un homme mon fils !
Il y eu beaucoup de traduction de ce poème de Kipling. |
| | Nombre de messages : 3643 Âge : 32 Date d'inscription : 22/06/2009 | Insane. / Avant, j'avais un rang. Mais c'était avant. Mer 2 Juin 2010 - 18:09 | |
| Pas mal ta traduction Borichio, fidèle, impeccable. |
| | Nombre de messages : 4379 Âge : 29 Pensée du jour : SUR JE DEPUIS 10 ANS C'EST LA FÊTE Date d'inscription : 03/12/2007 | Kid / Un talent FOU Mer 2 Juin 2010 - 18:14 | |
| Le titre de ce topic fait très compil' Nostalgie mais j'adore ce qu'on y trouve |
| | Nombre de messages : 3643 Âge : 32 Date d'inscription : 22/06/2009 | Insane. / Avant, j'avais un rang. Mais c'était avant. Jeu 3 Juin 2010 - 18:50 | |
| Nous verrons (Chateaubriand)
Le passé n'est rien dans la vie, Et le présent est moins encor ; C'est à l'avenir qu'on se fie Pour donner joie et trésor. Tout mortel dans ses yeux devance Cet avenir où nous courrons ; Le bonheur est espérance ; On vit, en disant : nous verrons.
Mais cet avenir plein de charmes, Qu'en est-il lorsqu'il est arrivé ? C'est le présent qui, de nos larmes, Matin et soir est abreuvé ! Aussitôt que s'ouvre la scène Qu'avec ardeur nous désirons, On bâille, on la regarde à peine ; On vit, en disant : nous verrons.
Ce vieillard penche vers la terre : Il touche à ses derniers instants ; Y pense-t-il ? Non : il espère Vivre encore soixante-dix ans. Un docteur, fort d'expérience, Veut lui prouver que nous mourrons ; Le vieillard rit de la sentence Et meurt, en disant : nous verrons.
Valère et Damis n'ont qu'une âme, C'est le modèle des amis. Valère en un malheur réclame La bourse et les soins de Damis : " Je viens à vous, ami si tendre, Ou ce soir au fond des prisons... - Quoi ! ce soir même ? - On peut attendre. Revenez demain : nous verrons. "
Nous verrons est un mot magique Qui sert dans tous les cas fâcheux. Nous verrons, dit le politique ; Nous verrons, dit le malheureux. Les grands hommes de nos gazettes, Les rois du jour, les fanfarons, Les faux amis, les coquettes, Tout cela vous dit : nous verrons. |
| | Nombre de messages : 2046 Âge : 31 Localisation : Paris Date d'inscription : 11/11/2007 | petit tiret / Crime et boniment Jeu 16 Sep 2010 - 20:46 | |
| Tristesse beau visage
adieu tristesse bonjour tristesse tu es inscrite dans les lignes du plafond tu es inscrite dans les yeux que j'aime tu n'es pas tout à fait la misère car les lèvres les plus pauvres te dénoncent par un sourire bonjour tristesse amour des corps aimables puissance de l'amour dont l'amabilité surgit comme un monstre sans corps tête désappointée tristesse beau visage
PAUL ELUARD |
| | Nombre de messages : 2186 Âge : 30 Localisation : Paris Pensée du jour : Qu'importe ce qu'on peut en dire je suis venue pour vous dire Ma plus belle histoire d'amour, c'est vous... Date d'inscription : 02/05/2010 | Rozbaum / Crime et boniment Jeu 16 Sep 2010 - 21:43 | |
| Eluard, quel chialeur, quel génie. |
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