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 Poésie : écrire en versification ou en vers libre ?

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Invité  /  Invité


Chers camarades JE,
Je constate sur la section poésie un rideau de fer qui la sépare en deux directions : la poésie versifiée et la poésie libre. Certains membres privilégient la première voie, d'autres préfèrent la seconde, ce qui m'amène à une interrogation précise : écrire des poèmes avec la rigoureuse versification ou bien user de la liberté poétique ?
De mes premiers écrits personnels, qui ont affleuré au large de mes douze ans, j'ai débuté par la versification. L'esprit novice, je me suis forcé à trouver le rimant, à respecter le mètre, à abuser de l'alexandrin ou du décasyllabe, ainsi que de chercher à recopier les poètes que j'adore. J'ai débarqué sur le forum, la malle pleine de ces vers, maladroits, redondants, conventionnels, selon les premiers avis. Puis, à seize ans, j'ai décidé de me lancer dans le vers libre, et de m'assouplir au niveau des règles, de me libérer du carcan.
Toutefois, l'envie de reprendre la versification me tenaille parfois, et j'hésite à recommencer, de peur de ne plus m'en détacher.
De votre côté, qu'avez-vous comme opinion ?

 
Pasiphae
   
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Pasiphae  /  Truquage geniphasien


Le rideau de fer sur JE sépare à mon avis, plus que des techniques, des visions de la poésie. La vraie question n'étant pas de pratiquer tel ou tel vers, mais d'avoir tel ou tel prédécesseur, telle ou telle référence.

Pour le reste, fais toi plaisir, la réponse à cette question n'existe pas, et le vers est vivant aussi longtemps qu'on le pratique et l'interroge sous toutes ses formes.
 
Mahendra Singh Dhoni
   
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Mahendra Singh Dhoni  /  Slumdog pas encore Millionaire


La distinction n'est pas entre ceux qui pratiquent le vers libre ou le bout rimé ; mais entre ceux qui conçoivent la poésie comme une essence, dotée de caractéristiques invariables, et ceux qui considèrent qu'est poésie ce qui se nomme ainsi. 

Y a aussi ceux qui s'en foutent.

j'écris de la poésie libre, plastique, formelle parce que je considère, moi, que s'il fallait trouver un invariant à la poésie (et donc un critère distinctif des autres genres) ce serait le travail sur la langue et le langage. Qui put être à un moment un travail sur les sonorités, sur le rythme et la musicalité, mais qui peut plus radicalement, ou plus contemporainement, interroger ce que l'on peut dire, ce que l'on peut déformer, donc, même, ce que c'est qu'un mot, ce que c'est qu'un signe. 
La rime, la forme inventée jadis, permet très bien d'interroger la langue, surtout aujourd'hui que ces pratiques sont tombées en déshérence. 

Il y aura toujours des individus convaincus qu'il n'existe de la poésie qu'une définition étroite. Ce sont les mêmes qui rejettent toute transformation en ce qu'elle est décadente, et considère, même, l'innovation comme le plus ultime des péchés. L'art devant être beau ; mais le beau impossible à préciser pourtant...
 
art.hrite
   
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art.hrite  /  Chantre brahmane ज्ञानयोग


Je n'ai pas de grande certitude sur ce sujet, seulement l'impression que l'implicite de certains désaccords ne portent pas tant sur l'opposition "l'art doit être beau" (donc conserver les formes traditionnelles) vs l'art doit être un travail formel (donc la poésie une recherche sur le langage). Enfin c'est peut-être partiellement le cas. Mais c'est un peu simplifier les choses et à mon avis l'essentiel ne se joue pas là. En tout cas, je ne me reconnais pas dans cette opposition. Je crois que ces désaccords portent plutôt sur la manière dont on conçoit la valeur du signe en poésie.

(Parenthèse pour Trôme, au cas où :
le signe c'est la relation entre un signifiant et un signifié. En gros, Trôme, si je prends le mot "armoire", le signifiant, c'est la forme sensible du mot (a-r-m-o-i-r-e) et le signifié, c'est ce qu'il veut dire, le concept désigné ("Grand meuble, ordinairement plus haut que large, garni de tablettes et fermé par une ou plusieurs portes, destiné à renfermer les objets de ménage, le linge, les vêtements").


En gros, si les désaccords portent comme je le crois sur la manière dont on valorise le signe, la vraie grande question c'est peut-etre, résumée un peu abstraitement : quand on interroge le signe, donne-t-on la priorité au signifié ou au signifiant ? de quelle manière établit-on ce lien, comment fait-on jouer ou altère-t-on cette relation dans l'ensemble d'un poème ou d'une lecture ? pour quels effets ? quelle expérience sensible ou intellectuelle ?
Ou encore : Interroge-t-on, dans le travail poétique, la langue comme système de signes ou le discours comme porteur d'une référence au réel ?

Tout dépend de ce qui pour nous fait sens :
Si on considère que le travail doit porter sur la langue comme système de signes, alors la référence (aux sentiments personnels/à la réalité extérieure ; si cette distinction a un sens) devient inessentielle et superflue, auquel cas le poète travaille essentiellement sur le signe pour lui-même (autonomie absolue de la poésie sur le monde).  
Si on considère que le travail poétique doit porter sur le discours comme porteur d'une référence, le poète travaille essentiellement sur des énoncés (le rapport entre le langage et son autre ; le langage comme matériau au moyen duquel on transpose quelque chose qui lui est possiblement antérieur, extérieur ou supérieur).  Donc sur des images, métaphores, représentations mentales. Éventuellement en tension avec le vers, rythme, sonorités, (typo)graphie.
Après, il y a aussi le travail lettriste, qui à mon avis, comme son nom l'indique, décrète que l'élément essentiel de la poésie ce n'est ni le rapport vers/syntaxe, ni le signe, mais la lettre, ou plus exactement le phonème. On évacue le sens (signifié ou référence linguistique), au profit du son ; on est vraiment aux limites du langage humain. Ce qui fait sens (mais le mot est mal approprié), ce ne sont plus que les valeurs sonores et rythmiques ; l'exploration des possibilités articulatoires, vocales et pneumatiques (relatives au souffle, en un sens très matériel).

à priori je ne vois pas d'autre grande conception de la poésie. Pas nécessairement exclusives les unes des autres. Dans les faits, ce n'est pas si tranché.

Après, pour prendre l'exemple de la versification que tu évoques, je dirais que  
le vers fixe, en imposant la loi du nombre et la rime, invertit la façon dont le lecteur ou l'auditeur est attentif à ce qu'il lit ou écoute ordinairement : au lieu de suivre la pente spontanée de la compréhension, càd oublier aussitôt la manière dont les choses sont dites (disons : leur forme) pour fixer son attention sur le sens de ce qui est dit, il va être amené à osciller entre la forme sonore (et/ou graphique) et le sens du texte sans pouvoir décider de ce qui l'emporte : l'un et l'autre étant mis, plus ou moins, sur un pied d'égalité. Ça se justifie d'autant plus que la structure d'un vers ou d'une strophe ne coïncide pas nécessairement avec la structure syntaxique (ce qui définit la cadence du poème). Donc, le rythme et les sonorités gagnent le prestige qu'elles n'ont presque jamais dans les situations ordinaires de communication. L'idée qui sous-tend ça, c'est en gros que le son enrichit le sens, et vice-versa.

Par contre, pour le vers libre, c'est plus compliqué. Très sommairement je dirai qu'il peut continuer l'entreprise du vers fixe : en insistant peut-être davantage sur la valeur visuelle et rythmique du poème plus que sur sa valeur à proprement parler sonore. Mais plus révolutionnairement, son émergence est accompagnée de l'idée qu'on peut tout simplement se passer d'une syntaxe pour écrire un poème. Donc, la poésie n'est pas une affaire de rapport phrase/vers/voix ; mais plutôt du rapport signe/page et/ou signe/lettre/voix. D'où nous viennent ceux qui ont été le plus loin sur ce terrain : les lettristes, poètes sonores, etc.

je ne sais si je tombe dans le travers essentialiste évoqué par Mahendra, mais je me hasarderai à dire qu'il y a ici peut-être quelques traits pertinents pour comprendre ce qui nous oppose les uns aux autres, à côté des oppositions type : subjectivisme vs objectivisme, par exemple, que j'ai toujours beaucoup de mal à assimiler.

J'espère n'avoir pas été trop inintelligible.
 
Silence écrit
   
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Silence écrit  /  Péril 666


Mes deux prédécesseurs ont, beaucoup mieux que je n'aurais su le faire, exprimé ma pensée. Il est vrai que, pour beaucoup de poètes actuels (et j'étais de ceux-là, il n'y a pas si longtemps), le vers fixe, l'alexandrin, le sonnet etc. sont de formes dépassées, surannées, qui ont dit tout ce qu'elles avaient à dire et n'ont plus droit de cité dans un genre (la poésie, donc), qui se veut constante recherche de nouveauté. C'est pour cela, entre autres, que je m'efforce de lire un maximum de poésie contemporaine, moi qui n'ai été élevé pendant longtemps qu'avec des trucs qui ne dépassaient pas 1924 (à la louche).
Je suis un peu revenu de cet "extrémisme" gentillet.

Aujourd'hui je dirais : écris ta poésie, camarade ! Quelle qu'en soit la forme, tu trouveras toujours des gens pour la trouver sublime, et d'autres pour la trouver mauvaise. Nourris-toi de l'admiration des premiers et progresse grâce aux critiques des seconds, mais trouve la forme qui te correspond.

À titre personnel, je vois (actuellement) la poésie comme un ensemble et j'essaie de lui donner une dimension picturale. Qu’est-ce qu’un poème ? Du son, de la musique, du rythme, du sens. Le sens est dernier à frapper aux portes de l’oreille ; le poème a déjà frappé deux ou trois fois auparavant pour tenter de communiquer.
Le poème-tableau, donc, par son côté pictural, est une clef supplémentaire pour ouvrir la serrure de l’autre (le poète). Il vient frapper en tout premier et, surtout, frappe immédiatement, sans que le poème n’ait besoin de temps pour se développer. On obtient image > son > rythme > sens (chronologiquement, dans l'ordre dans lequel les informations parviennent au lecteur).

...

J'espère avoir été clair également :mrgreen:

Silence écrit
http://silenceecrit.wordpress.com
 
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pehache  /  Crime et boniment


"Continuelle recherche de nouveauté"...
En soi, le programme du "progressisme". L'idéologie (le politique, mot interdit ici) mine la pensée. [ En avant, en marche, homme nouveau, progrès// archaïsme, passé, vieillerie- liens perdus...] La macronie règne depuis longtemps, y compris sur le monde des "arts", si ce mot signifie encore quelque chose.
 
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Invité  /  Invité


Merci pour vos réponses !

Pasi : Mon analyse de départ n'est pas juste, ou manque de précision. Ce ne sont pas deux directions de poésie qui s'opposent, mais deux directions de la concevoir. La technique, chacun la travaille, et la vision, chacun la possède individuellement. Je compte toujours me faire autant plaisir à écrire des vers.

MSD : L'idée de conception de la poésie revient chez toi, les individus convaincus d'une définition étroite existaient, existent et existeront. Je trouve toutefois leur opinion paradoxale puisque "l'art doit être beau", ce qui soulève comme interrogations : qu'est-ce que le beau ? ici, un attrait physique qui donne son charme à la poésie et qui la rend plaisante, agréable ? Mais je pense aussi qu'on peut définir le beau, avec des caractéristiques propres à lui-même. On y trouve ce rapport signifiant-signifié comme l'a soulevé art.

art : Merci pour ce long commentaire, je n'ai rien à redire.

Silence : Comme Pasi, tu me dis de me faire plaisir à écrire,tu as raison, je réponds oui. Comme MSD, tu déclares que le vers fixe et la forme classique sont tombés en désuétude, je ne suis pas tout à fait d'accord, en effet, tant que des individus (ceux qui écrivent des vers sans se dire poètes, ou ceux qui hésitent à le dire, mais c'est une autre question), pratiqueront cette versification, le vers fixe vivra toujours. Mais je suis d'accord avec vous pour dire que son utilisation a diminué avec le temps, toutefois, il lui reste un certain souffle de vie.


Dernière édition par Trôme le Mer 3 Mai 2017 - 13:38, édité 1 fois
 
Pasiphae
   
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Pasiphae  /  Truquage geniphasien


Oui bien sûr ! Beaucoup de poètes contemporains utilisent encore le vers fixe, et tentent même parfois de retrouver des formes fixes anciennes et moins exploitées que les traditionnels alexandrin / octosyllabe. Certains travaillent à même ces vers pour les subvertir autrement que ne le fit Rimbaud. Sur cette question, tu as le très bel essai de Roubaud, La Mort d'Alexandre
 
Nedjma
   
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Nedjma  /  Bile au trésor


Pour ma part, j'aime les deux formes. Je ne trouve pas que la forme versifiée soit dépassée, au sens où dans les arts, les formes anciennes reviennent souvent après être tombées en désuétude un temps.
Et puis autant il y a des modes dans l'écriture, autant du côté du lecteur, je ne suis pas sûre que ces modes soient si suivies que ça : un lecteur d'aujourd'hui sera-t-il forcément plus sensible à une poésie en vers libre ou en prose ? En tout cas pour mes élèves, c'est assez faux. Ils ont des sensibilités différentes, et s'enthousiasment parfois pour un sonnet, parfois pour un poème en prose. Dans la chanson, par exemple, la rime et le mètre demeurent, les lecteurs d'aujourd'hui conservent cette habitude à l'oreille par la musique, aussi.  

En tant que lectrice, j'aime autant Ponge, Reverdy, Macé, Breton... que Hugo, Marbeuf, Baudelaire... Ce sont des moyens différents de travailler la langue, mais de mon point de vue aussi valables les uns que les autres. Pas sûre non plus qu'il faille absolument subvertir ou détourner les formes anciennes quand on les utilise. Pourquoi pas, mais je n'y vois pas d'obligation.
En poésie, on recherche l'expressivité, la densité expressive, et je crois qu'on peut l'atteindre de différentes manières.
https://evadezulier.wixsite.com/website
 
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Je vais peut-être m'attirer les foudres de certains de mes camarades JE, et je m'en excuse, mais j'avoue que j'ai toujours eu du mal avec les vers libres. Ça fait trop moderne pour moi. Je suis assez traditionaliste. A mon sens, la poésie doit suivre certains codes. C'est dépassé et démodé, certes, mais j'ai une vision assez romantique à ce sujet. La poésie que je préfère est celle qui nous vient d'une période allant du moyen-âge au 18eme siècle.
Oui je sais, j'ai un discours de vieux con... Razz  De toute façon, j'ai toujours pensé que je n'étais pas né à la bonne époque... :mrgreen:
 
Pasiphae
   
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Pasiphae  /  Truquage geniphasien


Je ne suis pas sûre que les vers-libristes ne suivent aucun code, par contre ! Attention à la dichotomie poésie codifiée - libre (le vers libre porte d'ailleurs très mal son nom).
 
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Crying or Very sad

Je pense c'est à celui qui écrit de choisir comment il veut écrire.


J'ai du mal à faire des rimes en ce moment dans le sens où ce que j'écris en rimes me saoule ! Je n'aime pas, en ce moment ce que j'écris en vers, j'en ai honte, ça rime je trouve ça fait bébé, ça m'embête.

J'aime, en ce moment, perdre mes lignes dans des constructions grammaticales, en dérouler de longs passages pour avoir à récupérer le fil des idées.

Plus, je relis ce que j'écris, veux ne plus voir ce que j'écris mais le vois encore, donc même en vers "libres" je suis pour moi grillée, ma petite perversion réapparait et ça me saoule ; idem pour mon romantisme, je le vois et ça me dit des trucs chelous (pas trop mais bon je sais pas comment expliquer que je suis obligée de faire avec), ceci-dit : il me semble voir une amélioration, une déviation naturelle, à laquelle je ne manquerai pas d'adhérer pour m'"améliorer".

Je retournerai peut-être aux vers fixes ! J'aime bien parfois me tester sur des alexandrins, voir si je suis toujours aussi Un nulle en "e" muet et en rythme forcé, Deux douée en déroulés. C'est vrai, il me semble, que les formes fixes aide à se juger sur des formes connues !

Bisous mes amitiés !!!


Alice
 
Mahendra Singh Dhoni
   
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Mahendra Singh Dhoni  /  Slumdog pas encore Millionaire


J'ai l'impression d'avoir été très précis dans ma réponse et qu'on l'a lu un peu à travers un a priori...
Je crois, pour le dire beaucoup plus simplement, qu'en dernier terme la poésie ne peut se réduire qu'à un travail sur la langue. Qui comprend, bien entendu, la réflexion sur les sons autant que la déformation des signes. Il n'y a pas de limites à ce qu'on peut faire, ici. Et encore, le disant, je me rends compte que l'on établit une barrière avec autre chose que le signe. Donc il faut comprendre langage dans toute son extensivité et également asignée comme on peut dire, oralement, averbale.

Il n'existe pas de choses périmées ; seules les imitations, le refus de l'invention sont à proscrire. Puisqu'elles ne sont, au mieux, que des copies pas trop mal fagottées. Il n'y a pas "d'archaïsmes" sinon en un sens positif, la chose, vieille qu'on rénove, qu'on adapte à un présent différent de ses conditions d'énonciation. Disons qu'un modèle, une mode, une façon, nait toujours dans un contexte social, politique, économique déterminé ; rien n'empêche cependant de ses les réapproprier pour des millions de raison. C'est encore user de toutes les ressources de la langue, langue conçue dans son sens le plus extensif, ne la laissant être limitée par aucune définition préalablement étroite. Qui sera, elle, contrairement aux formes anciennes, toujours le passé dépassé.
 
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Je vais commencer avec une petite digression sur mes trois premiers paragraphes, mais elle me permettra de poser mon ressenti poétique :] Il est difficile de nier qu’il existe un clivage entre ceux qui pratiquent le mètre et ceux qui pratiquent le vers libre, mais si je devais donner un avis tout à fait personnel, ce serait que le vrai clivage se situe davantage entre ceux qui produisent une poésie de la transparence et ceux qui pratique une poésie du ressenti. La forme ne me paraît pas importante, surtout dans la mesure où un poème métré mal exécuté ne vaut pas mieux qu’un poème en vers libre mal exécuté, et vice versa !

Pasiphaé l’a bien dit, un poème obéit à tout un tas de règles, ne serait-ce que celles de la langue pour commencer ! Je ne vais pas vous la faire à l’envers, j’écris peu en vers libres, mais les rares texte que j’ai produits avec cette technique étaient tout aussi réfléchis que mes mètres. Je ne sais pas si tous les mots étaient à leur place et si je suis passé à la ligne lorsqu'il le fallait, mais en tout cas je m'y suis efforcé.

Silence écrit a bien résumé ce qu’on pense généralement du mètre : c’est vieux et poussiéreux. De mon côté — et c’est pour cela que je parle d’autant plus volontiers du clivage —, je trouve que le vers libre est souvent un accès à la facilité et une voie toute trouvée vers une forme d’obscurantisme que je ne m’explique pas, mais à laquelle je suis très souvent confronté. Attention : je ne mets pas tout les poètes du vers libre dans le même panier ; mais les incompréhensions ont toujours été face à ces auteurs-là. J’admets que ma remarque peut relever du préjugé, mais je fais néanmoins la part des choses car je lis aussi des choses intelligibles en vers libres, et d’autres complètement opaques en mètres.

Du coup, vous l’aurez compris, je prône une poésie accessible au lecteur. Mais tout le monde ne recherche pas la même chose non plus en écrivant / en lisant de la poésie. Que ce soit en vers ou en vers libre, sens-toi libre d’écrire ce que tu veux, Trôme. Il faut juste s’attendre à ce que le lecteur n’y lise pas ce qu’il voulait !

Après, pour revenir sur le côté obsolète de la poésie métrée, c’est quelque chose de tout à fait vrai : on ne peut plus écrire des vers aujourd’hui comme on le faisait au XVIe… tout comme on ne peut plus écrire de la prose comme c’était le cas il y a quelques siècles ! Je ne crois pas que ce soit la forme qui soit obsolète, mais plutôt ce qu’on en fait, ce qu’on y dit. Il faut savoir trouver de nouvelles rimes, en réactiver d’anciennes, éviter peut-être des inversions outrancières ou l’emploi de mots dépassés, que sais-je, mais la forme en elle-même, si elle est vieille, n’est pas hors course à mon avis. D’ailleurs, à peu près toutes les règles de métrique qu’on juge vieillottes ou stupides obéissent en réalité à des faits de langue qu’on applique à l’oral ou en prose sans y prendre garde. C’est la même chose du point de vue de la mélodie, et même si Verlaine a voulu nous y encourager, ce n’est pas sans raison que le vers de onze syllabes n’a pour ainsi dire jamais trouvé de client : c’est bancal et ça ne plaît pas vraiment à l’oreille.

C’est aussi pour ça que je dirai qu’il n’y a pas « deux directions » pour concevoir la poésie, ne serait-ce que parce que je pense qu’il n’y en a pas qu’une de concevoir la poésie métrée. Il suffit de voir certains sauter au plafond quand je disloque mon vers avec des rejets de tous les côtés, en règle générale ça passe plus que difficilement :mrgreen: Il suffit aussi de voir ce que trois poètes différents feraient avec la même rime :]

[Voilà, sinon, pour répondre à DartyXXXI, moi mon souci en ce moment c’est d’arriver à ne plus mettre de « Et » en début de vers. C’est plus compliqué que de ne plus utiliser des adverbes en –ment !]

*

Pasiphae a écrit:
Sur cette question, tu as le très bel essai de Roubaud, La Mort d'Alexandre
Ouvrage assez d’accès j’ai trouvé Very Happy Mais je pense que je m’attendais aussi à autre chose. J’ai moins galéré à lire son ouvrage sur le jeu de go silent
 
Pasiphae
   
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Akëdysséril a écrit:
Silence écrit a bien résumé ce qu’on pense généralement du mètre : c’est vieux et poussiéreux. De mon côté — et c’est pour cela que je parle d’autant plus volontiers du clivage —, je trouve que le vers libre est souvent un accès à la facilité et une voie toute trouvée vers une forme d’obscurantisme que je ne m’explique pas, mais à laquelle je suis très souvent confronté. Attention : je ne mets pas tout les poètes du vers libre dans le même panier ; mais les incompréhensions ont toujours été face à ces auteurs-là. J’admets que ma remarque peut relever du préjugé, mais je fais néanmoins la part des choses car je lis aussi des choses intelligibles en vers libres, et d’autres complètement opaques en mètres.

Justement, Roubaud analyse avec finesse cet "obscurantisme" : il s'agit du recours au vers libre surréaliste, qu'on utilise d'autant plus volontiers que c'est celui auquel on est le plus acclimatés en tant que jeunes lecteurs. Le vers libre surréaliste est en vérité un vers contraint : il s'interdit la rime, il s'interdit  même le recours accidentel à un vers "connu" (6, 8, 12 syllabes), il pratique assez peu la ponctuation... En fait ces "règles" sont intégrées inconsciemment, mais elles n'en sont pas moins contraignantes. D'où la conclusion de Roubaud : pour pratiquer un vers vraiment libre, il faut être tout à fait conscient des choix que l'on fait, sans quoi l'on risque de retomber dans un vers qui est en fait non-libre.

Pour le bouquin de Roubaud, c'est vrai qu'il a certains chapitres très durs (j'ai laissé tomber dès qu'il abordait des nombres), mais son histoire du vers se lit comme du petit lait


Dernière édition par Pasiphae le Lun 1 Mai 2017 - 15:38, édité 1 fois
 
   
    
                         
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