De nombreux écrivains-voyageurs ont rapporté de leurs voyages des livres dans lesquels ils racontent leurs périples. Descriptions, ressentis, impressions, rencontres... ils font découvrir au lecteur les pays tels qu'ils les ont vécu. Ils font part de la façon dont ils ont abordé des régions du monde, ils tentent de partager leurs aventures.

Mais qu'est-ce que recherche le lecteur en ouvrant ces récits de voyage ?

Il cherche à rêver. A s'évader tout simplement. A aller voir ailleurs, s'il y fait meilleur, comment est-ce qu'on vit là-bas, quelle est la culture, comment sont les gens, les paysages...

J'ai lu beaucoup de récits de voyage, d'une part parce que j'aime découvrir le monde et que ce n'est pas évident de voyager partout où l'on voudrait, d'autre part, parce que certains sont de véritables bijoux littéraires. L'un d'eux m'a particulièrement marquée : Le désert des déserts, de Wilfred Thesiger, paru aux éditions Plon/Terre humaine.

Rêver, s'évader, voir ailleurs... Les récits imaginaires permettent également de faire cela. Quant à découvrir une culture, des gens, des paysages, tout cela est possible dans les reportages télévisés (où l'image vient aider le spectateur). Comme le dit Molly, "certains sont de véritables bijoux littéraires". Mais c'est aussi le cas de nombreux ouvrages qui ne sont pas des récits de voyage.

Il y a surement autre chose encore encore qui attire le lecteur vers les récits de voyage. Et ces livres sont aussi divers que les voyages menés. Est-ce la singularité d'un parcours donne tout son sens à un récit de voyage ? Plutôt que les quelques paysages, qui sont finalement décrits de nombreuses fois par plein d'auteurs.
Que trouve-t-on dans un récit de voyage qu'on ne trouve pas ailleurs ?

Merci Molly pour ta référence, je vais aller feuilleter ce livre dans une librairie.

Non, les récits imaginaires ne permettent pas la même chose. Ils font tout deux rêver mais ce n'est pas le même ressenti. Les pays ou contrées décrites dans un récit on sait qu'elles sont réelles. On sait qu'un jour si on veut on pourra si rendre dans ces endroit magiques, fabuleux. Et ça c'est fou. Se dire qu'un jour on pourrait rejoindre cet endroit magnifique ça fait rêver. D'une autre manière que les récits imaginaires.

Citation :

Quant à découvrir une culture, des gens, des paysages, tout cela est possible dans les reportages télévisés (où l'image vient aider le spectateur).

Perso, je n'ai pas la télé, alors... et puis le filtre de l'écriture permet d'aller beaucoup plus loin dans le témoignage, d’approfondir l'expérience. De prendre son temps.
Mais les reportages filmés peuvent être passionnants également. C'est juste autre chose.

Et comme le dit Fanny, une fiction ne joue pas du tout le même rôle qu'un récit de voyage.

Des auteurs comme Nicolas Bouvier (L'usage du monde, etc.) sont non seulement des voyageurs, mais aussi et surtout, des écrivains, avec une plume particulièrement intéressante, et un regard très personnel sur les pays qu'ils découvrent. C'est ça surtout qui est intéressant : leur manière de nous entraîner dans leur vision des choses.

Si vous aimez les récits de voyage, je vous conseille les roses d'atacama de Luis Sepulveda. Bon ses nouvelles sont plus concentrées sur les personnnages mais elles nous font aussi voyager partout. Je vous laisse le résumé:

Qu'est-ce qui rapproche un pirate de la mer du Nord mort il y a six cents ans, un Argentin qui décide de sauver les forêts de Patagonie, un instituteur exilé qui rêve de son école et s'éveille avec de la craie sur les doigts, un Bengali qui aime les bateaux
et les amène au chantier où ils sont détruits en leur racontant les beautés des mers qu'ils ont sillonnées? Seulement cette frontière fragile qui sépare les héros de l'Histoire des inconnus dont le nom restera dans l'ombre. Voici, riche d'une humanité palpable, dans ce style sec et incisif auquel nous a habitués Luis Sepùlveda, toutes ces vies recueillies par un voyageur exceptionnel.

Je suis d'accord avec ce que tu écris, je partage ta vision. Et d'ailleurs, je n'ai pas de télévision non plus chez moi. L’écriture permet de partager des émotions, des ressentis, un vécu non retranscriptible dans un documentaire télévisé.

Molly a écrit:

Des auteurs comme Nicolas Bouvier (L'usage du monde, etc.) sont non seulement des voyageurs, mais aussi et surtout, des écrivains, avec une plume particulièrement intéressante, et un regard très personnel sur les pays qu'ils découvrent. C'est ça surtout qui est intéressant : leur manière de nous entraîner dans leur vision des choses.

Ce qui est intéressant, c'est le regard personnel de l'auteur. Le lecteur recherche plus un regard singulier qu'une vérité générale. Finalement, la façon dont l'écrivain-voyageur voit le pays sur lequel il écrit est plus intéressante que la simple description du pays ?

Pour ce qui est du livre de Nicolas Bouvier, personnellement je n'ai pas trouvé qu'il a une "plume particulièrement intéressante". Qu'est-ce que tu as aimé dans son écriture ?

Kandahar, 3 heures du matin

Kandahar, cette nuit là, ses rues de terre muettes et fraîches, ses éventaires à l'abandon, ses platanes, ses mûriers tordus dont le feuillage faisait dans l'ombre une ombre plus chaude, nous les avons plutôt rêvés que vus. La ville ne poussait pas un soupir. Seulement ici et là, le frémissement du djou ou le ricanement d'une corneille réveillée par nos phares.
Moi, c'était surtout dormir qui m'intéressait. Pendant que nous rôdions à dix à l'heure en quête d'un hôtel, et que les étoiles s'éteignaient une à une, le mot "Kandahar" prenait successivement la forme d'un oreiller, d'un édredon, d'un lit profond comme la mer où il s'agirait de s'installer, pour cent ans par exemple.

Nicolas bouvier dans L'usage du monde, Afghanistan

Juste un petit passage extrait au hasard, le premier sur lequel je suis tombé. Je trouve ça assez évocateur, non ?

Oui, cet extrait est très bon. J'ai lu ce livre il y a peu, mais avec un regard très critique et peut-être en trop peu de temps.

Je lis des récits de voyage depuis peu, parce que je n'en avais pas eu l'occasion auparavant. Personnellement, j'y trouve un intérêt parce que je retrouve des moments, des émotions, des ressentis que j'ai vécu. Souvent, ce que l'on apprécie aussi dans les livres, c'est de s'identifier au narrateur, de se reconnaitre dans ce qu'il écrit.

Et c'est pour cette raison que je me demande ce que quelqu'un qui n'a pas vécu cela aime dans ces récits de voyage.

J'aime beaucoup ce qu'écrit (écrivait, plutôt) l'anglais Wilfred Thesiger (il n'y a pas que Le désert des déserts, mais aussi Les arabes des marais, et d'autres ouvrages), parce qu'il fait presque un travail d'ethnologue, et il est vraiment passionné. Lui, il ne cherche aucun effet de plume. Il n'a pas no plus ce regard distancié, légèrement ironique, de Nicolas Bouvier. En fait, Thesiger est en quelque sorte tombé amoureux des bédouins d'Arabie, il a vécu avec eux pendant plusieurs années, et il raconte tout, dans les détails, avec une incroyable sincérité, sans se faire de cadeau à lui-même, ni à ses compagnons d'ailleurs. Et ses personnages (réels) sont follement attachants, on se prend à les aimer autant que lui. Enfin, je l'ai ressenti comme ça, pour ma part...

Tu as l'air passionnée de récits de voyages Molly ! En tous les cas, tu as pas mal de références dans ce domaine, et on vois que tu aimes ça. As-tu toi-même voyagé ?

En tous les cas, tu apportes quelques pistes de réflexions à ma question. C'est un type de littérature que je découvre également avec plaisir.

Oui, j'ai pas mal voyagé, mais aujourd'hui, je bouge moins, malheureusement.

Sinon, je n'ai pas lu tellement de récits de voyage, faut pas croire J'ai bien aimé les écrits de la suissesse Ella Maillart et aussi ceux de Freya Stark, mais aucun ne vaut Thesiger à mes yeux. Tu as l'air toi-même passionnée et pleine de curiosité pour le sujet !

amusant, mais moi les récits de voyage, je préfère les lire sur le net. Je les aime assez brefs et ciblés, finalement, je ne me vois pas lire ça si cela traîne en longueur.

Marrant, en lisant le titre ici j'ai cru que ce serait un topic invitant les JE à rédiger leurs récits de voyage, d'une bonne plume.
Pour moi, un récit de voyage, c'est comme une lettre qu'on envoie à un ami avec une carte postale à côté, ce doit être court et intense.

Molly a écrit:

Oui, j'ai pas mal voyagé, mais aujourd'hui, je bouge moins, malheureusement.

Sinon, je n'ai pas lu tellement de récits de voyage, faut pas croire J'ai bien aimé les écrits de la suissesse Ella Maillart et aussi ceux de Freya Stark, mais aucun ne vaut Thesiger à mes yeux. Tu as l'air toi-même passionnée et pleine de curiosité pour le sujet !

Oui, tu as raison, je suis "pleine de curiosité pour le sujet", je cherche à comprendre ce qui fait l'essence de ces récits de voyage. Je ne sais pas si je suis "passionnée" par le voyage, mais comme c'est ce que j'ai fait la plus grande partie de ma vie, je vis avec.

QuillQueen, un récit de voyage ne "traine" pas en longueur, il se construit, se développe. L'écrivain-voyageur progresse dans ses écrits comme dans ses périples. Un récit de voyage n'est pas simplement une lettre pleine de souvenirs que l'on envoie à un ami, c'est un parcours.
Si tu veux nous faire partager tes écrits, "d'une bonne plume", tu peux toujours le faire !